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Los Angeles 1932

Les jeux au pays du cinéma

         La terrible crise économique, qui suit le krach boursier de 1929, n'altère pas le succès des Jeux de Los Angeles, organisés du 30 juillet au 14 août. Des Jeux qui vivent à l'heure d'Hollywood, à deux pas. Charlie Chaplin, Douglas Fairbanks et Gary Cooper entre autres sont des spectateurs passionnés.
         Désignée exceptionnellement neuf ans avant les Jeux, la ville de Los Angeles se voit ainsi récompensée de sa fidélité envers l'olympisme. Candidate malheureuse à plusieurs reprises, la cité californienne s'était même proposée comme solution lors de la querelle entre Chicago et Saint Louis en 1904.

Rendez-vous élitiste.
         Le "Village olympique" n'accueille qu'environ 1400 participants - moitié moins qu'à Paris et Amsterdam- car les frais de déplacement des pays européens, comme en 1904, sont trop élevés pour emmener une délégation importante. Toutefois à défaut de quantité, les pays ont misé sur la qualité en présentant leurs élites. Quant aux femmes, elles n'ont pas accès au village et sont logées dans un hôtel. 37 nations, dont la Chine pour la première fois, sont malgré tout au rendez-vous californien. Le nombre de sports est réduit à 14 et la participation par pays se limite à trois athlètes par discipline (au nombre de 16).
         Dans "leur" Coliseum, dont la capacité a été portée à 105.000 places, les athlètes américains, dont Mildred "Babe" Didrikson, lauréate du 80 m haies et du javelot, deuxième de la hauteur, s'en donnent à coeur joie. L'athlétisme est d'ailleurs le roi des Jeux, attirant un public très nombreux.
         Mais en natation, les Japonais sont les grands vainqueurs avec cinq titres sur six épreuves.

Vins français et italien.
         Au total, les Etats-Unis remportent 103 médailles (41 en or) devant l'Italie (36, 12 en or), la France (19, 10 en or) et la Suède (23, 9 en or).
         Ces Jeux voient aussi l'introduction du chronométrage automatique, ainsi que l'apparition du podium réunissant les trois premiers et de l'hymne national pour saluer le lauréat. Bien qu'en pleine période de prohibition, une exception est faite pour les Français et les Italiens qui affirment que le vin fait partie de leur régime alimentaire.
         Enfin, deux grands noms de l'athlétisme, accusés de professionnalisme, sont interdits de compétition en Californie: le Français Jules Ladoumègue, présent malgré tout comme journaliste, et le légendaire Finlandais Paavo Nurmi.
         A Los Angeles, au contraire de Berlin quatre ans plus tard, on ne parle pas encore de politique. Les Jeux sont une excellente publicité touristique. Les vainqueurs acquièrent la gloire et les vaincus conservent la vision d'un magnifique voyage.



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Lieu : Du samedi 30 juillet au dimanche 14 août
Participants : 1408 (dont 127 femmes)
Participants français : 65 (dont 2 femmes)
Nations : 37
Sports : 14
Epreuves : 116
Palmarès français : 19 médailles (10 Or, 5 Argent, 4 Bronze)
Ouverture prononcée par : Charles Curtis (Vice-président des Etats-Unis)
Serment prêté par : George Calnan (Etats-Unis - Escrime)
Président du CIO : Henri de Baillet-Latour (Belgique)
Journalistes : 303



  Le saviez-vousTop 

        Réussite : L'Irlande ne présente que trois athlètes mais remporte deux médailles d'or avec Robert Tisdall (400 mètres/haies) et Patrick O'Callaghan (marteau) et se classe quatrième au triple saut avec Eamon Fitzgerald.

        Podium : Pour la première fois les médailles sont remises aux athlètes sur un podium. En l'honneur du vainqueur, l'hymne national de son pays sera joué.

        Accueil : Le village olympique est composé de 700 petites maisons préfabriquées. C'est le premier "vrai" village du genre. Il est surveillé par des cow-boys à cheval.

        Diplomatie : Dans le défilé, la délégation anglaise est placée entre les Français et les Allemands pour éviter tout incident diplomatique.

        Précision : Apparition du chronométrage au 1/100e de seconde. Les arrivées sont systématiquement filmées. Cette évolution prouve son utilité très rapidement avec l'arrivée du 100 mètres. Les Américains Eddie Tolan, le vainqueur, et Ralph Metcalfe sont séparés de 5/100e, écart que les yeux des juges auraient eu du mal à voir.

        Quota : Afin de limiter la domination sans partage de certaines nations, le CIO décide de limiter à trois le nombre de représentants par pays dans chaque épreuve.

        Suprématie : Les Noirs américains remportent toutes les épreuves de sprint.

        Arrivée : La Chine et la Colombie font leur première apparition au JO.

        Vite fait, bien fait : Le premier champion olympique de la 10e olympiade est un Français. Le poids plume parisien Raymond Suvigny obtient la consécration le soir même de la cérémonie d'ouverture.

        Nippon nageurs : Les nageurs japonais gagnent quatre des cinq titres individuels. Deux des quatres médailles d'or japonaises sont remportées par des nageurs, Yosuki Miyazaki (100m) et Kusuo Kitamura (1500m), âgés respectivement de 16 et 14 ans. En outre le pays du soleil-levant s'impose dans le seul relais disputé, le 4 X 200 mètres nage libre. Seul l'Américain Clarence "Buster" Crabbe empêche le Grand Chelem en remportant le 400 mètres nage libre.




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Didrikson, la First lady.
         Trente-deux ans après l'arrivée des premières femmes, l'olympisme tient sa première star féminine. L'Américaine Mildred Didrikson remporte trois médailles, deux en or et une d'argent, en participant à autant d'épreuves qui font d'elle la vedette des Jeux de Los Angeles. Grâce à une totale polyvalence, elle sera plus tard considérée comme la sportive la plus complète du siècle.
         Agée de 21 ans au moment de se rendre en Californie, la Texane a déjà une solide réputation. Au début du mois de Juillet, son club "Employers Casualty Insurance Company of Dallas" remporte les Championnats des Etats-Unis interclubs avec pour seule et unique représentante: la jeune Mildred. Le dauphin, l'Université d'Illinois, en compte 22.
         La moisson, de celle que l'on surnomme "Babe", aurait pu être plus importante si le CIO n'avait pas limité le nombre d'épreuves par athlètes à trois. En conséquence, elle choisit pour les Jeux de s'aligner sur une course (80 mètres haies), un saut (hauteur) et un lancer (javelot).

Une course, un lancer, un saut.
         Pour le javelot, sa première épreuve, Didrikson s'impose aisément avec un jet de 43,68 mètres alors que l'engin lui a glissé des mains. Elle enchaîne avec le 80 mètres haies, qui lui vaudra son premier record du monde. Dès la série, elle égale la meilleure performance mondiale (11"8) de la Sud-africaine Marjorie Clark. Et en finale, après un faux départ, elle améliore son temps (11"7), battant sur le fil sa compatriote Evelyne Hall (même temps) et Clark (11"8).
         Pour Didrikson, la compétition se termine par une troisième médaille en hauteur. Après les sauts règlementaires, elle est ex-aequo avec sa compatriote Jean Shiley (1,65 mètre), les deux jeunes femmes établissant au passage un nouveau record du monde. Les juges, après un saut de barrage inutile, décident pourtant de déclarer Shiley vainqueur parce qu'ils estiment la technique de "Babe" illégale, tout en lui laissant sa performance. Elle saute la tête la première.
         En 1936, Didrikson tentera de participer aux Jeux de Berlin mais les dirigeants américains ne la sélectionneront pas car quelques années plus tôt elle a donné des cours de natation. Qu'importe pour cette férue de sport. Elle intègrera une équipe masculine de base-ball et sera l'une des plus grandes championnes de golf de tous les temps.



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Des Jeux à dimensions hollywoodiennes.
         A deux pas des célèbres studios d'Hollywood, les organisateurs des Jeux de Los Angeles voient grand et, après plusieurs tentatives infructueuses, ils se montrent dignes de l'événement. Gigantisme et professionnalisme sont les maîtres mots de cette olympiade pour une réussite indéniable.
         Malgré le krach boursier de 1929, l'argent va affluer en Californie. Grâce à une subvention municipale de 1,5 million de dollars, un emprunt de 1 million et l'apport de nombreux capitaux privés, toute une série d'installations fleurit. En particulier un village olympique et un stade olympique à la capacité accrue.
         Alors que le premier village olympique, apparu huit ans plus tôt à Paris, n'est fait que de barraquements en bois, les Américains vont recevoir les athlètes du monde entier dans 700 maisonnettes préfabriquées, de style colonial, et édifiées sur un terrain de golf surplombant le Pacifique.
         De même, les responsables du Comité d'organisation estiment que le Coliseum, dessiné en 1920, n'est pas assez grand (75.000 places) et font rajouter une enceinte portant la capacité à 105.000 places. Un stade équestre de 10.000 places est aménagé, le stade de football de Pasadena est transformé en vélodrome de 85.000 places.

3000 artistes à l'ouverture.
         Mais ce qui pourrait passer pour de la mégalomanie de la part des organisateurs se révèle en fait un véritable succès populaire. Ainsi la cérémonie d'ouverture offre un spectacle fastueux et haut en couleur, qui rassemble près de 3000 chanteurs et musiciens, sous les yeux des plus grandes vedettes du 7e art, venues en voisins.
         Les compétitions sportives ne sont pas en reste puisque chaque jour près de 70.000 personnes se pressent au Coliseum pour assister aux épreuves d'athlétisme.
         Le résulat de ce professionnalisme, illustré par l'hébergement et l'organisation quasi parfaite des épreuves, est dans des performances de premier plan. En athlétisme, pour n'évoquer que le sport olympique N°1, les records du monde masculins tombent sur 100 m, 400 m, 800 m, 400m haies, les relais 4 x 100 et 4 x 400, le triple saut et la perche. Chez les femmes, les performances sont encore meilleures puisque les six épreuves donnent lieu à autant de records du monde.
         Cette organisation très professionnelle est évidemment mise au service des sportifs. Ainsi, les vainqueurs repartiront avec un titre et la gloire et les vaincus avec des images inoubliables, comme au cinéma.


 
Cette année làTop 

        Chine : Les troupes japonaises entrent à Shanghai le 28 janvier.

        Assassinat : Le président Paul Doumer est assassiné le 6 mai par un exilé russe Paul Gorgulov.

        Rapt : La police découvre le cadavre du fils de l'aviateur Charles Lindbergh, âgé de 18 mois, qui avait été enlevé en mars.

        Nazis : Lors des élections du 31 juillet, le parti nazi d'Adolf Hitler devient la première formation politique allemande avec 37,4% des voix et 230 députés sur 607.

        Aviation : Le DO-X, un gigantesque hydravion d'une capacité de 100 passagers, réalise le premier vol commercial pour ce type d'appareil le 27 août.

        Inondations : 250.000 personnes meurent en Chine après la crue du Yang-Tse Kiang, "le Fleuve bleu".

        Etats-Unis : Le démocrate Franklin D. Roosevelt remporte les élections présidentielles du 8 novembre.

        Médecine : L'Américain Thomas Morgan élabore la théorie des chromosomes qui lui vaudra le Prix Nobel en 1933.

        Physique : Le Britannique James Chadwick découvre le neutron.

        Portugal : Le Premier ministre Antonio Oliveira Salazar instaure le 5 juillet une dictature qui sera installée jusqu'en 1974



      AnecdotesTop

        Radiation : Paavo Nurmi est radié à vie par la Fédération internationale pour cause de professionalisme la veille de la cérémonie d'ouverture. Il lui est reproché de toucher un pourcentage sur les recettes des stades dans lesquels il court. Jules Ladoumègue, lui, a été suspendu quelques mois par la Fédération française d'athlétisme pour les mêmes raisons. Il se console en devenant l'envoyé spécial du quotidien "L'intransigeant".

        First lady : La star de ces jeux est une femme, l'Américaine d'origine norvégienne et ancienne basketteuse, Mildred Babe Didrikson. En athlétisme, elle ne participe qu'à trois épreuves. Bilan: deux médailles d'or (80 m haies et javelot), une d'argent (hauteur). En hauteur, elle termine ex-aequo avec sa compatriote Jean Shiley (1,657 mètre -nouveau record du monde) mais après un saut de barrage qui ne donne rien, elle est déclarée battue en raison de sa technique jugée illégale, sa tête passant en premier. Plus tard, "Babe" fera partie d'une équipe masculine de base-ball. Puis elle jouera au golf et deviendra la meilleure joueuse du monde.

        Course dorée : Rétrospectivement le 400 m haies est la course la plus dorée. Au départ, se retrouvent les deux derniers vainqueurs olympiques, l'Américain F. Morgan Taylor (1924), qui finit 3e, et l'Anglais David Burghley (1928), 4e, le vainqueur du jour, l'Irlandais Robert Tisdall et celui qui remportera l'or à Berlin, l'Américain Glenn Hardin, 2e à Los Angeles.

        Longévité : Le lutteur suédois Carl Westergren remporte son troisième titre en gréco-romaine. En 1920, il s'impose chez les moyens, en 1924 il monte chez les lourds-légers pour le même résultat et, après un échec en 1928, renoue avec le succès à Los Angeles chez les super-lourds. Douze ans séparent donc son premier et son ultime succès.

        Show-business... : Lors de la cérémonie d'ouverture, on pouvait apercevoir dans les tribunes Gary Cooper, Charlie Chaplin, Buster Keaton... Il faut dire que les Jeux se déroulent à deux pas d'Hollywood.

        Tarzan : Dans le 400 m nage libre, victoire de l'Américain Clarence Crabbe qui, quelques années plus tard et à l'instar de Johnny Weissmuller tiendra le rôle de Tarzan au grand écran sous le prénom de Buster.

        Le compte est bon : L'organisation américaine est parfaite... jusqu'au 3000 m steeple. Le juge chargé de compter le nombre de tours, qui remplace le titulaire malade, oublie de compter le premier tour. Lorsque le Finlandais Volmari Iso-Hollo passe la ligne d'arrivée quelle n'est pas sa surprise en constatant qu'il lui reste un tour, il repart donc et s'impose sans difficultés. L'histoire devient plus grotesque pour les accessits. Au passage de l'arrivée "normale", l'Américain Joseph McCluskey est deuxième suivi par le Britannique Thomas Evenson. Mais au bout de l'ultime ligne droite Evenson remporte son duel avec 2/100e d'avance. Gentleman, McCluskey refusera une revanche le lendemain expliquant qu'une "course n'a qu'une seule ligne d'arrivée".

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