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Los Angeles 1984

Les jeux de Carl Lewis

         52 ans après, les Etats-Unis et Los Angeles accueillent de nouveau les jeux Olympiques d'été. Avec le boycottage cette fois de l'URSS et de seize autres pays satellitaires dont la RDA et Cuba, ces Jeux de la 23e Olympiade seront dominés par les USA avec un total de 174 médailles (dont 83 en or) et un homme, sa majesté Carl Lewis.
         Mais surtout ces Jeux marquent une étape importante dans l'histoire de l'institution: pour la première fois, les JO sont entièrement financés par le secteur privé, donc avec aucune aide gouvernementale. Présidé par un homme d'affaires accompli en la personne de Peter Ueberroth (47 ans), le Comité organisateur fera bien les choses puisqu'il dégagera un bénéfice de 150 millions de dollars. Du jamais vu !

Super-production hollywoodienne.
         Du 28 juillet au 12 août, 6797 concurrents, représentant 140 nations, répondent au rendez-vous californien malgré le boycott des pays du bloc soviétique et de quelques autres. Consolation pour les Etats-Unis: la Yougoslavie et la Roumanie sont présentes ainsi que la Chine dont c'est le grand retour après 32 ans d'absence.
         Dans la patrie du cinéma, le spectacle est permanent avec notamment des cérémonies d'ouverture et de clôture grandioses et dignes des super-productions hollywoodiennes. Outre le boycottage, il manquera un autre ingrédient pour faire entrer ces Jeux dans l'histoire: l'émotion.          Le public américain s'emflammera pour le parcours exceptionnel de Carl Lewis dans le vieux stade d'athlétisme du Coliseum, déjà site des Jeux en 1932. Celui qui deviendra "King Carl" a accompli un véritable exploit en remportant quatre médailles d'or: 100m, 200m, relais 4x100m et longueur. Le tout en 2 min 26, le temps passé sur la piste toutes compétitions confondues.

Public chauvin.
         Le public américain aura encore l'occasion de faire preuve de son chauvinisme exacerbé avec l'éternel Edwin Moses, qui a récupéré sur 400 m haies le titre conquis huit ans plus tôt à Montréal, avec le nageur Rick Carey (doublé 100 et 200m dos) et la merveilleuse Evelyn Ashford (doublé 100m et relais 4x100m). Il a suivi avec passion Joan Benoit, victorieuse du premier et dramatique marathon féminin de l'histoire olympique, Valerie Brisco-Hooks (200m, 400 m 4x400 m), la jeune gymnaste Mary-Lou Retton, première Américaine à remporter le concours général, et la nageuse Tracy Caulkins.
         Deux autres femmes, une Allemande de 28 ans et une Marocaine de 22 ans écrivent l'histoire: Ulrike Meyfarth gagne la hauteur (2,02m), douze ans après son titre de Munich, Nawal El-Moutawakil remporte le 400m haies et donne à l'Afrique sa première médaille d'or féminine et au Maroc son premier titre olympique.
         Parmi les grands vainqueurs de ces Jeux, figurent ainsi le décathlonien britannique Daley Thompson, qui a conservé son titre, son compatriote Sebastian Coe, le premier à réussir le doublé sur 1500m aux Jeux, le Marocain Saïd Aouita (5000m) et le rameur finlandais Pertti Karppinen (troisième médaille d'or en skiff).



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Dates : Du samedi 28 juillet au dimanche 12 août
Autres villes candidates : Aucune
Mascotte : Sam, l'aigle
Athlètes : 6797 (dont 1567 femmes)
Sélectionnés français : 240 (dont 50 femmes)
Nations : 140
Sports : 21
Epreuves : 220
Médailles distribuées : 688
Palmarès français : 28 médailles (5 en or, 7 en argent et 16 en bronze)
Ouverture proclamée par : Ronald Reagan, Président des Etats-Unis d'Amérique
Dernier porteur de la flamme : Bill Thorpe et Gina Hemphil, respectivement petit-fils et petite-fille de Jim Thorpe et de Jesse Owens
Flamme allumée par : Rafer Johnson, champion olympique du décathlon en 1960
Serment prêté par : Edwin Moses, champion olympique du 400 m haies en 1976
Président du CIO : Juan Antonio Samaranch (Espagne)
Droits de télévision : 286,314 millions de dollars
Journalistes : 3.837 (non compris ceux accrédités pour la radio et télévision)>



  Le saviez-vousTop

        Et de trois : Seule en lice après le retrait de Téhéran, la ville américaine de Los Angeles n'a eu aucune peine pour être désignée hôte des Jeux de la 23e Olympiade. Après Paris (1900 et 1924) et Londres (1908 et 1948), la mégapole californienne devient la troisième ville à organiser à deux reprises le rendez-vous olympique.

        Boycott toujours : L'URSS et de ses satellites ne participent pas aux Jeux. Ces pays sont: l'Afghanistan, l'Angola, la Bulgarie, la Corée du Nord, Cuba, l'Ethiopie, la Hongrie, le Laos, la Mongolie, la Pologne, la RDA, le Sud-Yémen, la Tchécoslovaquie, l'URSS et le Vietnam.

        Dopage : Les compétitions se déroulent sous haute surveillance au niveau du dopage. Quelque 2000 athlètes sont contrôlés avec des résultats obtenus dans un délai de 24 à 48 heures. Au total, douze athlètes sont sanctionnés.

        Historique : La Chine, qui effectue son grand retour aux Jeux après 32 ans d'absence, a obtenu sa première d'or le 29 juillet 1984 à... Chino, au pistolet libre grâce à Zu Xu Haipheng. La Chine décrochera au total 32 médailles, dont 15 d'or.

        A vendre : Le prix moyen d'une place était de 18 dollars. 7,8 millions de billets ont été vendus.

        Renouveau : Plus jeune championne olympique (hauteur) en 1972 à l'âge de 16 ans, l'Allemande Ulrike Meyfarth a récidivé douze années plus tard, à Los Angeles, devenant à cette occasion l'athlète... la plus âgée à triompher dans cette discipline.

        Nouveauté : Natation synchronisée, gymnastique rythmique et sportive et planche à voile sont pour la première fois au programme.

        Espoirs : En football, les professionnels ont le droit de participer à deux conditions: aucune sélection en équipe nationale "A" et être âgés de moins de 23 ans.

        Exploit : L'exploit des Jeux revient à Carl Lewis. A 23 ans, le sprinteur américain gagne quatre médailles d'or (100 m, 200 m, 4x100 m et saut en longueur). Comme Jesse Owens quarante-huit ans plus tôt à Berlin.

        Tricolore : La France remporte 28 médailles (5 or, 7 argent, 16 bronze). Pour la première fois depuis 1924, les médailles se répartissent en autant de sports: 12. Les cinq médailles d'or françaises ont été obtenues par Pierre Quinon (perche, 5,75m à son premier essai), l'équipe de France de football, Jean-François Lamour (sabre), Philippe Boisse (épée) et Philippe Héberlé (tir, carabine air comprimé 10 m).

        Toujours jeune : Huit ans après les Jeux de Montréal en 1976, Edwin Moses, qui n'avait pu défendre son titre en 1980 à Moscou pour cause de boycottage, est redevenu champion olympique du 400 m haies.



L'exploitTop

Carl Lewis: 2 minutes et 26 secondes pour entrer dans l'Olympe
         Les Jeux de Los Angeles devaient être ceux de Carl Lewis. Et ils l'ont été. En 2 minutes et 26 secondes passés sur la piste du Coliseum, l'athlète américain est devenu une légende du sport et de l'olympisme.
         Lewis, alors âgé de 23 ans, a égalé du même coup le record établi par son illustre compatriote Jesse Owens à Berlin en 1936, à savoir remporter quatre médailles d'or au cours des mêmes Jeux et dans les mêmes disciplines: 100 et 200m, relais 4x100m et longueur.
         Flash-back sur le parcours exceptionnel de "King Carl" au cours de ces Jeux marqués de son empreinte. Lewis a d'abord commencé par le 100 m en disputant quatre courses: série, quart de finale, demi-finale et finale. Première médaille d'or en 9 sec 99 devant Sam Graddy. Lewis, plus solitaire que jamais, aura passé en tout 40 secondes et 49 centièmes sur la piste.

Mépris.
         Deuxième épreuve proposée: la longueur. Presque méprisant pour ses adversaires, il effectuera en tout et pour tout trois sauts: un en qualification (8,30m), deux en finale. Le premier sera le bon, mesuré à 8,54m, le suivant étant mordu. Cela lui suffira cependant pour s'octroyer sa deuxième médaille d'or devant Gary Honey. Il aura été environ 18 secondes en action.
         Puis vient le 200 m. Trois demi-tours de piste lui suffiront pour s'emparer aisément d'une troisième médaille d'or: 21 sec 02 en série, 20 sec 48 en demi-finale et 19 sec 80 en finale devant Kirk Baptiste. Cette fois, Lewis a passé le "temps-record" de plus d'une minute en course: 61 secondes 30 exactement.

Emotion enfin.
         Le sprinter américain a obtenu enfin sa quatrième médaille d'or en remportant le relais 4x100 m avec Sam Graddy, Ron Brown et Calvin Smith. Il a été en possession du bâton durant environ 26 sec 40, soit trois relais de 8 sec 80. Qui dit mieux ?
         Au cours de cette course disputée le dernier jour des Jeux, Lewis fera enfin passer un peu d'émotion en se jetant dans les bras de ses coéquipiers, non seulement champions olympiques mais aussi auteurs du seul record du monde d'athlétisme de ces Jeux et aussi heureux que lui de le porter en triomphe.
         Pour entrer dans la légende olympique, il aura donc fallu à Carl Lewis 2 minutes 26 secondes. Le temps d'illuminer les Jeux de Los Angeles devant un public aux anges sur une piste d'un Coliseum devenue en quelque sorte le Carl-Lewiseum...



      Le faitTop 

Les Jeux deviennent une affaire privée.
         En choisissant Los Angeles, le CIO avait fait un choix historique en décidant de confier pour la première fois l'organisation des Jeux au secteur privé et non aux pouvoirs publics.
         Peu après sa désignation, Tom Bradley, le maire noir de la cité californienne, confie la présidence du comité d'organisation à un homme d'affaires accompli en la personne de Peter Ueberroth (47 ans). Sa première déclaration est nette: les Jeux se dérouleront sans que les Californiens ne mettent la main à la poche.
         Pour mener à bien cette entreprise, l'organisation des Jeux est ainsi assurée par un comité privé entièrement indépendant, notamment au niveau financier, et il est décidé de ne procéder à aucune dépense inutile. A l'exception du vélodrome et de la piscine qui n'existent pas, il n'y aura pas de construction nouvelle de sites.

Droits TV-record.
         Le président du Comité organisateur -le LAOOC (Los Angeles Olympic Organisation Committee)- imagine un financement à trois niveaux. Tout d'abord, les droits de télévision. ABC obtient l'exclusivité de la retransmission des Jeux pour la bagatelle de 225 millions de dollars. La vente des droits à l'étranger rapportera 50 millions de dollars. Ces sommes, payables à l'avance, ne sont pas remboursables.
         Puis, quelque 7,8 millions de billets seront mis en circulation. Le bénéfice des billets mis en vente sera d'environ 90 millions de dollars, le prix moyen étant fixé à 18 dollars.
         Par ailleurs, pour éviter tout risque de déficit, le LAOOC obtient la participation financière d'une centaine de "parrains olympiques" qui assurent 25% du budget. Droit d'entrée: 4 millions de dollars chacune. Soit 140 millions de dollars supplémentaires.

Bénéfices.
         Pour "faire" encore plus d'argent, le Comité ne recule devant rien. Ainsi, les 19.000 km du parcours de la flamme olympique à travers une quarantaine d'états sont mis en vente. Recette: 30 nouveaux millions de dollars.
         Les travaux de rénovation des installations existantes sont confiés à des societés qui travaillent à leurs frais. Le roi de la restauration rapide, McDonald, paiera comptant par exemple les 4 millions de dollars nécessaires pour l'édification d'une piscine olympique. Compensation: la dite piscine s'appellera McDonald...
         Au bilan financier des Jeux, Peter Ueberroth sera fier de brandir le chiffre de 150 millions de dollars comme bénéfice. Son plus grand succès.


 
Cette année làTop 

        URSS : Youri Andropov, qui avait remplacé Leonid Brejnev comme chef de l'Etat de l'URSS, meurt le 9 février, 14 mois après sa prise de fonction.

        Espace : Les astronautes de la navette spatiale Challenger réalisent la première sortie autonome dans l'espace en février.

        Grande-Bretagne : Le syndicat de mineurs que dirige Arthur Scargill commence une grève pour protester contre la fermeture des puits non rentables le 12 mars.

        Football : Le club de Naples achète l'Argentin Diego Armando Maradona pour 16 millions de lires.

        Attentat : Le Premier ministre britannique Margaret Thatcher échappe à un attentat le 12 octobre pendant le Congrès de son parti à Brighton.

        Pologne : Trois membres des services secrets polonais capturent et assassinent le Père Jerzy Popieluszko, proche du syndicat indépendant Solidarnosc en octobre.

        Inde : Indira Gandhi, le premier ministre de l'Inde, est assassinée par deux membres de sa garde personnelle le 31 octobre.

        Etats-Unis : Le président Ronald Reagan est réélu sans problème le 6 novembre.

        Inde : Le 3 décembre, une fuite de gaz toxique dans une fabrique chimique de Bhopal provoque la mort de mille personnes.

        Afrique du Sud : L'évêque sud-africain, Monseigneur Desmond Tutu, reçoit le Prix Nobel de la Paix le 10 décembre.

 


      AnecdotesTop 

        Bénéfices : L'objectif des organisateurs était clairement annoncé au pays où le dollar est roi: faire des bénéfices. 50.000 bénévoles (qui ne coûteront rien), pléthore de sponsors et apport financier des chaînes de télévision permettront de largement dépasser les objectifs pour ces Jeux entièrement financés par des fonds privés. Et non plus par l'Etat. Une première.

        Objectif dépassé : A la fin des Jeux, il reste 150 millions de dollars dans les caisses du comité d'organisation.

        Smog : La pollution est un mal chronique à Los Angeles où 12.000 tonnes de résidus sont émis quotidiennement. Pendant les Jeux, le gouvernement fédéral avait demandé et obtenu que les 4000 usines ralentissent leur productivité de 20%.

        Standing ovation : Les délégations chinoise, roumaine et yougoslave ont eu droit à une standing ovation lors du défilé de la cérémonie d'ouverture. Le public témoignait ainsi sa reconnaissance envers ces trois pays ayant bravé l'ordre venu de Moscou en faveur du boycottage.

        Made in Hollywood : Conçue et réalisée comme une monumentale comédie musicale, la cérémonie d'ouverture des Jeux de Los Angeles est entrée dans l'histoire. Elle a été suivie par 2 milliards et demi de télespectateurs.

        Emotion : Incapable de parler tant il était ému, l'athlète américain Edwin Moses s'y est repris à trois fois avant de pouvoir prêter le serment olympique.

        Sécurité : La hantise du terrorisme a fait prendre au Comité organisateur des mesures de sécurité drastiques pour un budget-record de 55 millions de dollars avec notamment 17.000 hommes réquisitionnés (policiers, FBI, etc...) et 80 hélicoptères tournant en permanence dans le ciel de Los Angeles. Il avait même été prévu un robot-miracle pour désamorcer les bombes tandis que l'armée et la marine étaient en alerte au cas où...

        Communication : Près de 10.000 journalistes assuraient la couverture des Jeux. La chaîne américaine ABC, qui a investi 100 millions de dollars dans l'élaboration de produits de haute technologie, disposait ainsi de 3000 techniciens. Le spot publicitaire était estimé à 110.000 dollars l'unité pour 30 secondes.

        McDonald : Construite grâce aux fonds (4 millions de dollars) du roi de la restauration rapide, la societé McDonald, la piscine olympique portait tout simplement le nom de son sponsor.

        Drame : Le marathon féminin, présent pour la première fois aux Jeux, s'est fait une bien mauvaise publicité avec l'arrivée pathétique de la Suissesse Gabriela Andersen-Scheiss. Toutes les télévisions du monde diffusent les images apocalyptiques de la concurrente titubant sur la piste et refusant toute assistance, qui la disqualifierait. Cette agonie dure plus de 5 minutes, au cours desquelles le public, tour à tour, la soutient et demande l'aide des commissaires. Finalement classée 37e, la Suissesse se remettra vite et 15 jours plus tard participera à une course.

        Marathon suite : Dans la même course, les commissaires ont montré un "bel" esprit olympique. Alors que la modeste concurrente hondurienne Leda Diaz de Cano passait à mi-course avec près de 30 minutes de retard sur les premières, ils ont préféré la convaincre d'abandonner plutôt que de la laisser aller au bout de ce qui devait sans doute être son rêve. Leur raison: rendre au plus vite la route aux voitures.

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