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Moscou 1980

Moscou accueille des "jeux olympiques"

         Lorsque le 23 octobre 1974 Moscou est désignée pour accueillir les jeux Olympiques de 1980, le CIO ne se doute pas des difficultés qui vont se dresser à quelques mois de l'événement. Quatre ans après Montréal, le boycottage sera de nouveau en vedette à Moscou avec l'absence notamment des Etats-Unis.
         En 1980, le Mouvement olympique est encore victime de la politique pour la première visite olympique dans une ville de l'Europe de l'Est.
         L'invasion de l'Afghanistan par l'Armée rouge, en décembre 1979, provoque la colère du Président américain Jimmy Carter qui s'oppose à la participation des sportifs de son pays aux Jeux. Cette initiative fait tache d'huile: vingt-huit pays se rangent aux côtés des Américains. Les autres choisissent d'être à Moscou du 19 juillet au 3 août: environ 6000 athlètes de 81 pays sont recensés.

Publicité communiste.
         Pourtant, la capitale soviétique a préparé des Jeux grandioses pendant cinq ans. Tout est fait pour montrer une bonne image du communisme. Des enceintes sportives des plus modernes sortent de terre et celles qui existent, comme le stade Lénine promu stade olympique, sont modernisées. Mais l'effort est également fait en dehors des sites. Un mausolée de six étages, qui sert de centre de presse, est dressé à la place d'une cinquantaine de maisons individuelles détruites. Les dômes du Kremlin sont redorés et les bulbes des églises restaurés.
         Compte tenu des absents de marque, notamment américains, la valeur des compétitions, disputées dans un climat peu sportif, n'est pas toujours à la hauteur de l'événement en dépit de la chute de 36 records mondiaux.
         Représentants des pays de l'Est et Britanniques se partagent les honneurs en athlétisme. Les représentants de sa Gracieuse Majesté triomphent comme le sprinteur Alan Wells sur 100 mètres, les coureurs de demi-fond Sebastian Coe (1500 m) et Steve Ovett (800 m) ainsi que le décathlonien Daley Thompson.

Salnikov surnage.
         En natation, le Soviétique Vladimir Salnikov éclabousse de tout son talent la compétition en remportant trois médailles d'or (400 m, 1500 m et relais 4 x 200) imité par l'Allemande de l'Est Barbara Krause (100 m, 200 m et relais 4 x 100).
         Le gymnaste soviétique Alexandre Ditiatine monte sur tous les podiums pour décrocher huit médailles et le boxeur cubain Teofilo Stevenson remporte son troisième titre olympique consécutif chez les lourds.
         Au moment où le rideau tombe sur ces Jeux, le bilan est plutôt médiocre. D'une part, le boycottage américain a biaisé les compétitions et amené une ambiance lourde. D'autre part, des sportifs se sont régulièrement plaints d'irrégularités. Faveurs faites aux équipes soviétiques ou conseils donnés par les juges aux athlètes locaux ont mis à mal la morale sportive au moment où l'Espagnol Juan Antonio Samaranch succède à Lord Killanin à la tête du CIO.



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Dates : Du samedi 19 juillet au dimanche 3 août
Autre ville candidate : Los Angeles
Mascotte : Misha, l'ourson
Athlètes : 5217 (dont 1125 femmes)
Sélectionnés français : 120 (dont 23 femmes)
Nations : 80
Sports : 21
Epreuves : 202
Médailles distribuées : 631
Palmarès français : 14 médailles (6 or, 5 argent et 3 bronze)
Ouverture proclamée par : Léonid Brejnev, président du Soviet Suprême d'URSS
Dernier porteur de la flamme : Viktor Saneiev (URSS, athlétisme)
Flamme allumée par : Sergueï Belov (URSS, basket-ball)
Serment prêté par : Nikolaï Andrianov (URSS, gymnastique)
Président du CIO : Lord Michael Killanin (Irlande)
Droits télévision : 87,984 millions de dollars
Journalistes : 7.629



Le saviez-vousTop 

        Série : Le boxeur cubain Teofilo Stevenson remporte pour la troisième fois consécutive le titre olympique chez les lourds.

        Barrière : Le nageur soviétique Vladimir Salnikov, qui remporte 3 médailles d'or, passe la barrière mythique des 15 minutes sur 1500 m en réalisant 14 min 58 sec et 27.

        Choix : Le CIO a désigné Moscou le 23 octobre 1974 en devancant Los Angeles par 39 voix contre 20.

        Records : Toutes disciplines confondues, 36 records du monde sont battus.

        Invincible : Sur 621 médailles distribuées, l'URSS en remporte 195 (80 en or) devant la RDA (126 médailles dont 47 d'or). URSS et RDA récoltent ainsi plus de 50% du total des médailles.

        Sain : Aucun cas de dopage n'est signalé malgré 1646 contrôles, dont 831 pour les stéroïdes anabolisants.

        Politique : Les Etats-Unis appellent au boycottage de cette olympiade pour protester contre l'invasion de l'Afghanistan par l'URSS. La RFA, le Canada, le Japon et une soixantaine de nations suivent les Etats-Unis. Tandis que la Grèce propose d'organiser les Jeux à la place de Moscou.

        Libre choix : Le Comité olympique français laisse à chaque athlète et à chaque Fédération le choix de participer aux Jeux. Il n'y aura ni drapeau ni hymne national français. Les Français seront finalement présents dans dix sports sur vingt-et-un.

        Défilé : Lors de la cérémonie d'ouverture, 65 délégations défilent derrière leur drapeau, et 16 derrière le drapeau olympique, dont la France.

        Argent : Le budget d'organisation a été de 9 milliards de dollars.

        Parraineur : La firme Coca-Cola refuse de parrainer les JO de Moscou pour protester contre l'intervention de l'URSS en Afghanistan.

        Sécurité : Pendant les Jeux, Moscou est en état de siège. Les effectifs de la milice passent de 50.000 à 200.000 hommes. 165 rues de la ville sont réservées à la circulation olympique. D'autre part, une vague d'épuration dans les milieux d'opposition a lieu. Certains sont éloignés de Moscou pendant la durée des Jeux, d'autres sont emprisonnés dans des camps de travail ou des asiles psychiatriques.



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Parisi et Rey montrent l'exemple.
         Inscrit au programme olympique depuis 1964, le judo progresse dans la hiérarchie olympique avec de plus en plus de catégories. A Moscou, la France profite de circonstances favorables, boycottage et catégories supplémentaires, pour véritablement intégrer les grandes nations du judo, notamment grâce aux titres d'Angelo Parisi et de Thierry Rey.
         La trajectoire de Parisi, qui concourt chez les plus de 95 kg et en toutes catégories, est singulière. Né en Italie, ses parents partent s'installer à Londres lorsqu'il a 3 ans. Il obtient alors la double nationalité et en profite pour remporter une médaille (bronze en toutes catégories) pour la Grande-Bretagne. Après s'être marié avec une Provençale en 1975, il devient français et fait le bonheur des Tricolores.
         A Moscou, il se présente dans deux catégories: les lourds (+ de 95 kg) et en toutes catégories. Dans cette dernière, il doit céder en finale face à l'Allemand de l'est Dietmar Lorenz sur un yushi-gachi (décision) au bout des 7 minutes de combat.

Parisi franchit les obstacles.
         Toutefois, son heure de gloire vient avec les lourds. Certes, les champions du monde japonais, Sumio Endo (médaille de bronze à Montréal) et Yasuchiro Yamashita (invaincu en 194 combats entre 1977 et 1984) sont absents pour cause de boycottage de leur pays mais Parisi se sort magistralement de tous les obstacles qui se dressent sur sa route.
         En finale, il bat le Bulgare Dimitur Zaprianov sur un ippon après 6 min et 14 sec de combat. Le 27 juillet, il devient donc le premier champion olympique français en judo.
         Quelques jours plus tard, le 1er août, la finale des super-légers oppose Thierry Rey au Cubain Rafael Rodriguez Carbenell. La catégorie des moins de 60 kg fait sa première apparition aux Jeux. Thierry Rey, alors âgé de 21 ans, prend exemple sur son compatriote et s'impose à l'issue des 7 minutes réglementaires grâce à un ko-soto-gari.
         Ces deux titres, très médiatisés en France, bénéficient au judo français dans son ensemble. Après Moscou, les judokas seront toujours présents dans le palmarès olympique, avec en point d'orgue les Jeux de Barcelone (7 médailles), pour la première apparition des femmes (2 en or, 1 en argent et 4 de bronze) et ceux d'Atlanta avec 4 médailles (3 en or, 1 de bronze).
         Le judo français a su suivre la route tracée par Parisi et Rey, notamment David Douillet, présenté à ses débuts comme le "fils" spirituel de Parisi.

 


      Le faitTop

L'olympisme traîne le boycottage comme un boulet.
         Le 27 décembre 1979, l'URSS envahit l'Afghanistan pour soutenir le coup d'Etat de Babrak Karmal. Le 19 juillet 1980, le chef de l'Etat soviétique, Leonid Brejnev, ouvre les jeux Olympiques sans une soixantaine de pays qui ont décidé un boycottage après le coup de force de l'Armée Rouge.
         Entre ces deux événements, plusieurs mois d'intenses négociations, de polémiques et de débats font vaciller l'oeuvre du baron Pierre de Coubertin.

L'Afghanistan comme enjeu.
         En cette période de Guerre froide, les Etats-Unis sont les premiers à s'indigner. Washington utilise le boycottage, c'est une nouveauté, comme mesure de représailles. Le 20 janvier, Jimmy Carter adresse un ultimatum au Kremlin. "Si dans un mois au plus tard, vos troupes n'ont pas évacué l'Afghanistan, l'équipe olympique américaine n'ira pas à Moscou et nous demanderons aux autres pays de s'abstenir aussi".
         Deux jours plus tard, les Soviétiques enfoncent le clou en déportant le dissident Andreï Sakharov.
         Le Chancelier allemand, Helmut Schmidt, choisit de suivre les Américains, tout comme les Chinois, qui ont pourtant réintégré le CIO le 19 novembre 1979.
         La Grèce offre ses services pour suppléer Moscou mais cette proposition n'est pas retenue par Lord Killanin, qui tente de colmater les brèches jusqu'au dernier moment. A ce titre, il rencontre Leonid Brejnev à Moscou et obtient des concessions début mai, exigées par les Occidentaux, symboliques certes mais qui sauvent peut-être les Jeux.
         Les équipes pourront s'abstenir de cérémonie d'ouverture, celles qui le souhaiteront pourront défiler derrière le drapeau olympique et, lors de la remise des médailles, le drapeau et l'hymne olympiques pourront être présentés en lieu et place de ceux du pays du vainqueur.

Libre choix français.
         Il faut dire que dans chaque pays le débat fait rage. En France, dès le début de la crise, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Jean-Pierre Soisson, laisse un libre-choix au Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et aux Fédérations. Le CNOSF accepte donc l'invitation de Moscou. Mais les Fédérations d'équitation, de voile et de tir déclarent forfait et finalement les Français concourront dans 10 sports sur 21 mais sans drapeau tricolore, ni Marseillaise.
         En Grande-Bretagne, le Comité olympique va à l'encontre des injonctions du Premier ministre, Margaret Thatcher, en décidant d'envoyer une délégation.
         Le 12 avril, le Comité olympique américain (USOC) vote à près de 60 % pour le boycottage. Le 25 avril, le Canada, le Japon et la Corée du Sud déclinent à leur tour l'invitation.
         De leur côté, 29 pays musulmans prônent le boycottage car ils considèrent l'attaque contre l'Afghanistan comme une attaque contre l'Islam.
         Malgré une dernière tentative de Lord Killanin, qui se rend à Washington, une soixantaine de pays ne se rendent pas à Moscou.
         Le boycottage de 1976 avait surtout été la protestation d'un continent, l'Afrique, nouvellement intégré au CIO. Celui de 1980 marque véritablement l'intrusion de la politique dans le mouvement olympique. Les dirigeants se sont appropriés l'événement pour en faire un moyen de pression politique. Il n'est donc pas étonnant de voir quatre ans plus tard les Soviétiques absents des Jeux de Los Angeles qui se déroulent "chez l'ennemi".

 
 
Cette année làTop 

        Guatemala : La police guatemaltèque prend d'assaut l'ambassade d'Espagne, occupée pacifiquement par des manifestants qui protestent contre la discrimination, le 1er février. Bilan: 39 morts.

        Salvador : Monseigneur Oscar Arnulfo Romero, archevêque de San Salvador, est assassiné par des membres des escadrons de la mort pendant une messe, le 24 mars.

        Iran : Une opération militaire américaine échoue dans sa tentative de libérer les otages de l'ambassade des Etats-Unis à Téhéran. Huit soldats meurent dans un accident d'hélicoptère.

        Cinéma : Le Britannique Alfred Hitchcock, le roi du suspense, meurt à l'âge de 80 ans, le 29 avril.

        Yougoslavie : Le président de Yougoslavie, Josip Brod "Tito", qui dirige son pays depuis 1945, meurt à l'âge de 87 ans, le 4 mai.

        Iran : Le shah d'Iran, Mohammed Reza Pahlevi, meurt en exil au Caire le 27 juillet.

        Italie : 83 personnes meurent dans un attentat de l'extrème droite en gare de Bologne.

        Guerre : L'Irak attaque l'Iran, le 22 septembre. Une guerre, qui durera plusieurs années, commence.

        Pologne : Le syndicat indépendant "Solidarnosc" est créé le 22 septembre à Gdansk.

        Beatles : L'ex-Beatle John Lennon est assassiné à New York par un déséquilibré, le 8 décembre.



      AnecdotesTop 

        Double nationalité : Angelo Parisi a la particularité de remporter 4 médailles olympiques entre 1972 et 1984 sous deux passeports différents. Né en Italie, Parisi prend la double nationalité italo-britannique à son arrivée à Londres à l'âge de 3 ans. En 1972, il obtient la médaille de bronze en toutes catégories sous les couleurs anglaises. En 1975, il rencontre une Française qu'il épouse et en profite pour obtenir la nationalité française. Avec le kimono tricolore, il devient le premier français champion olympique de judo, en lourds, et ajoute à sa campagne moscovite de 1980, l'argent en toutes catégories. En 1984, il se contentera de l'argent en lourds.

        Perfection : Le gymnaste soviétique Alexandre Didiatine, qui remporte huit médailles sur les huit épreuves qu'il dispute (3 en or, 4 en argent et 1 en bronze), est le premier homme à obtenir la note maximale de 10 aux Jeux.

        Télévision : NBC avait acheté les droits de retransmission pour 87 millions de dollars. Après la défection d'une soixantaine de pays, dont les Etats-Unis, NBC renonce à la diffusion des Jeux mais récupère tout de même 90% de la somme engagée, grâce à un contrat d'assurance souscrit auprès de la Lloyds.

        Vacances : Le bruit court que les enfants moscovites de 7 à 15 ans ont été évacués de la capitale le temps des compétitions. Officiellement ils sont en vacances à la campagne. D'autres sources prétendent que c'est pour ne pas voir les visiteurs occidentaux et être "contaminés".

        Drapeaux : Lors de la cérémonie de clôture, l'institution olympique est bafouée. La coutume veut que le drapeau du pays hôte des Jeux suivants flotte aux côtés de ceux de la Grèce (berceau de l'olympisme) et du pays hôte (l'URSS en l'occurrence). Mais les Etats-Unis refusent de voir la bannière étoilée dressée et autorisent pourtant celui de la ville de Los Angeles, ville hôte des Jeux de 1984, à être présent dans le ciel moscovite.

        Bras d'honneur : Le concours du saut à la perche immortalise un cliché: celui du vainqueur, le Polonais Wladyslaw Kozakiewicz. Avec un saut de 5,78 mètres, il bat les favoris français et soviétiques malgré les sifflets qui accompagnent chacun de ses sauts. A l'issue du saut victorieux, alors qu'il est encore sur le matelas de réception, Kozakiewicz se fend d'un magnifique sourire et d'un élégant... bras d'honneur. La photo fera le tour du monde.

        Podium : La participation de nombreux pays sans leur drapeau et leur hymne a généré des podiums cocasses. Ainsi, à l'issue de la remise des médailles de la poursuite cycliste, l'hymne olympique retentit et trois drapeaux olympiques ont flotté pour récompenser le Suisse Robert Dill-Bundi, le Français Alain Bondue et le Danois Hans-Henrik Oersted.

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